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Cérémonie en mémoire des
Engagés Volontaires juifs morts pour la France
Bagneux 5 juin 2016
Discours d'Olivier Lalieu
Il y a 100 ans, le régiment de marche de la Légion étrangère combattait dans la bataille de la Somme. Il était à l’offensive le 4 juillet à Belloy en Santerre, un village transformé par les Allemands en camp retranché. 800 mètres de terrain plat le sépare des lignes françaises. Les combats sont effroyables durant quatre jours, mais la position est finalement conquise. Dans les rangs français, 25 officiers et 844 soldats sont tués. La prise de Belloy en Santerre demeure aujourd’hui encore un haut fait d’armes de la Légion étrangère.Le régiment de marche de la Légion étrangère avait été formé quelques mois plus tôt en novembre 1915 avec les survivants des différentes unités créées en 1914 au sein de la Légion pour rassembler ces volontaires étrangers.Ces régiments furent décimés, disloqués dans la fureur meurtrière des premières batailles. Le régiment de marche de la Légion étrangère demeure au front jusqu’au bout. Il est au feu de Verdun, au bois de Hangard, de Soissons à Villers-Cotterêts.En novembre 1918, quand s’achève ce qui devait être dans l’esprit des anciens combattants « la der des der », les trois-quarts des légionnaires ont perdu la vie. Leur héroïsme est reconnu. Le régiment de marche de la Légion étrangère est l’unité la plus décorée de l’Armée française. En choisissant cette fin de printemps pour son rassemblement annuel, l’Union des engagés volontaires anciens combattants juifs – leurs enfants et amis, se fait l’écho d’une autre offensive de la Légion, celle de Carency en mai et juin 1915. C’est dire si l’importance des combats menés par les engagés volontaires durant la Première Guerre mondiale doit être soulignée. Importance du sacrifice, importance du devoir accompli, importance du souvenir. La mobilisation de 1914 ne faiblit pas en 1939. Les volontaires étrangers sont une nouvelle fois des milliers à se presser dans les bureaux de recrutement. Parmi eux, de nombreux Juifs qui savent mieux que quiconque que ce n’est pas seulement l’Allemagne qui menace l’Europe, mais le nazisme qui représente un danger mortel pour la démocratie et les libertés, pour l’humanité. Une nouvelle fois, des milliers périront durant la campagne de France.En nous retrouvant au cimetière parisien de Bagneux, nous célébrons la mémoire de ces hommes. Nous exprimons notre fidélité à leurs engagements. Le sens de cette commémoration n’est pas de laisser entrouverte les plaies de la douleur, de la perte d’un cher parent. Comme l’exprime la sculpture de Nathan Rapoport, ce sont des hommes debout, courageux et fiers dont nous rappelons le parcours parfois tourmenté qui laissèrent derrière eux, femmes et enfants, pour s’engager au service de la France et des valeurs qu’elle incarne.Durant la Seconde Guerre mondiale, sur cette même terre de France, leurs mérites ne leur épargnèrent pas la haine antisémite. Leurs médailles ne furent pas des boucliers contre les humiliations, les arrestations, les rafles, la volonté d’anéantissement.Nous avons commémoré à Pithiviers et Beaune la Rolande, il y a quelques semaines, le 75e anniversaire de « la rafle dite du Billet vert », ce piège tendu à Paris par l’occupant allemand avec la complicité du régime de Vichy le 14 mai 1941. Parmi plus de 3700 juifs étrangers arrêtés, 400 sont des anciens combattants.Nous avons tenu à marquer cette date en lien avec le CERCIL, dont je veux rappeler que le Mémorial de la Shoah soutient l’action depuis sa création.La mémoire de l’engagement de 1914 comme de 1939 ne doit pas s’éteindre et nous en sommes les garants.Elle constitue l’une des pages héroïques de l’histoire des Juifs de France, l’une des pages de l’histoire de l’Armée française, l’une des pages de l’histoire de France.Sa valeur n’a pas de prix. Elle incarne la symbiose entre les Juifs et la France au cours des siècles, malgré les crises et les craintes parfois. Elle témoigne de ce que la volonté d’intégration dans la société française peut avoir de meilleur pour ces immigrés qui aspiraient à la paix et à la sécurité, et qui sacrifièrent leur vie pour la liberté de leur patrie de choix et d’adoption. S’il le fallait encore, elle montre à une opinion trop facilement influençable par les poncifs et les préjugés que les Juifs ne sont pas d’éternelles victimes, mais qu’ils se sont levés comme les meilleurs des citoyens pour aller se battre en criant leur amour de la France.Nous l’avons évoqué ici les années passées, l’Union des engagés volontaires anciens combattants juifs – leurs enfants et amis a souhaité se rapprocher du Mémorial de la Shoah. A partir de l’année prochaine, cette association fondée en 1944 va rejoindre le Mémorial de la Shoah. Ce ne sera pas une rupture mais une continuité dans l’œuvre entamée il y a plus de soixante-ans. L’Union avait elle-même assumé l’héritage des associations nées après 1918, cette première génération du feu qui avait érigé des caveaux ici même à Bagneux et qui perdurent grâce à elle.Le mémorial de la Shoah a pris l’engagement d’honorer et de faire vivre l’histoire et la mémoire des engagés volontaires, en rappelant aussi les valeurs qui furent les leurs. Ce faisant, c’est bien l’histoire et la mémoire de tous les Juifs de France dans les tourments du XXe siècle qui prend sa place au Mémorial, accompagnés par les descendants des engagés volontaires qui ne furent pas épargnés non plus par la guerre.Nous nous retrouverons donc tous ensemble une nouvelle fois l’année prochaine pour célébrer le souvenir de Belloy en Santerre et de Narvik; pour honorer le courage des engagés volontaires, ces étrangers morts pour la France, ces juifs passionnément français que la France se doit de ne pas oublier et dont il nous incombe plus que jamais de célébrer l’exemple.
Discours de Marcel Apeloig
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